samedi 29 avril 2017

L'importance de la météo dans les brevets ?

Deuxième étape logique dans la progression des brevets de la saison, celui de 200, on monte doucement en volume de kilomètres et en heures de selle. Je poursuis mes tests sur mon nouveau bike, l'objectif de ce samedi 29 avril serait d'améliorer mon temps sur cette distance, soit 8h42 réalisé l'année passée. 

Mais deux paramètres sont venus s'immiscer dans la réalisation de cette performance. D'abord un nouveau parcours largement modifié avec deux fois la montée de la Covey Hill, la première par le côté est, la plus dure, puis par le côté ouest en faux plat montant après un petit coup de cul. Ensuite et surtout, la météo annoncée. Certes il fera beau et la température sera douce mais le facteur gros vent s'est invité, et pas à peu près, 30 km-h d'ouest avec des rafales à plus de 50 km-h dans tous les secteurs traversés. Avec ces redoutables précisons de la science météorologique, on sait vraiment à quoi s'en tenir. 

J'ai recensé trois catégories de personnes face à l'analyse de la météo et sa prise en compte lors des brevets. Il y a celles qui la place en avant plan, si les conditions vont s'avérer très dures (pluie, vent, neige, tornade!), on va souffrir, y a plus de plaisir, ça peut être dangereux, donc je renonce. Ensuite. il y a une deuxième population qui s'en fout royalement, on a signé, c'est éventuellement pour en chier, ce ne sont pas trois gouttes et un petit courant d'air qui vont calmer nos ardeurs. C'est le cas par exemple de Jean le président et pas mal de vieux baroudeurs que rien n'arrête. Enfin il y a ceux qui en tiennent compte, qui pèsent le pour et le contre, qui réalisent qu'il y a un réel challenge et une difficulté ajoutée mais qui y vont quand même. Ils portent en eux ce petit grain de folie, c'est plutôt mon cas. Je me souviens cependant avoir chocké lors d'un 600 où une sacrée tempête était annoncée avec pluie et vent prévus au retour. Les quelques rescapés de ce brevet avaient effectivement bien soufferts, certains avaient terminé en état d'épuisement et d'hypothermie. Ceci étant posé, voyons ce qui s'est passé en ce fameux samedi soit disant un ti peu venteux. 

Tout de même légèrement anxieux, je me pointe vers 6h30 au stationnement de St Lambert dans ma belle auto. Nathaniel est déjà là, il n'a pas beaucoup d'entraînement mais il tient à faire ce 200. Pourtant Guiseppe Marinoni en personne a essayé de l'en dissuader, mais Nath est décidé, yes he can! Toute cette bande d'inconscients de breveteux se rassemble en une trentaine de minutes, chacun prépare son matose en mangeant des bananes. Je traverse une minute de terreur quand mon Garmin gèle inopinément à l'allumage, a 2 minutes du départ, impossible de faire un brevet sans GPS! Heureusement, Nathaniel est mon sauveur, il le remet en marche, comme par miracle. Fin de la grosse suée. 

Sténopé colorisé du départ du 29 Avril 1917 ;-)   (Photo CVRM)

Km 0, sept heures pétantes, clic clac Kodak de Jean, je m'élance le premier, impatient d'en découdre. Plus d'une vingtaine de joyeux pédaleurs m'accompagnent, ambiance habituelle de départ, on discute gentiment en tournant les jambes. C'est à peu près le même noyau qu'au brevet Pop, Fred la machine est déjà parti au large, suivi par Antoine. Puis Ralph, Olivier, Marc, Yvon et son fiston Jacob, Martin Doyon qui a troqué son fixie par son titane, Raymond le maitre des parcours, le groupe des trois athlètes Marise, Olivier C et Francis. D'anciens se sont ajoutés, Gaby, trois autres Martin, Bergeron, Lemay et Dugré, et pardon pour ceux que j'ai oubliés ou que je ne connais pas le nom. 

Km 10, pour l'instant le vent d'ouest ne s'est pas encore trop levé et nous progressons sans résistance. Voici Taschereau, peloton groupé, ça fait l'élastique en fonction des lumières et des arrêts. 

Km 18, nouveau parcours dans Candiac, on délaisse l'abominable 104. J'ai des problèmes avec mon indicateur de cadence, décidément, y'en a marre de ces bébelles électroniques. Trop d'appareils autour de mon Garmin, qu'il me dit l'effronté. Je me glisse en queue de peloton pour le resetter, ça fonctionne. Mais ça déconnera toute la journée quand je roulerai avec certains, bizarre et à suivre. 

Km 30, montée Monette, vent arrière toute puis 217 de côté. Les locomotives devant prennent leur rythme de croisière, ce sont Ralph, Olivier, Martin L et d'autres épisodiquement. Ça décroche fatalement par l'arrière, pas de pitié pour ceux en manque de forme, bye bye Gaby. Je m'accroche bien planqué dans les roues. 

Km 38, Les accélérations continuent et on a légèrement changé de direction, avec un vent pareil, ça ne pardonne pas. Les abris sont moins évidents et c'est plus dur. Je laisse filer les cadors en restant avec le petit groupe des trois athlètes, Marcus et Raymond. De toute façon, le contrôle n'est pas loin, on se reverra. 

Km 43, regroupement à St Cyprien, contrôle au Shell, moyenne de 28. On ne perd pas de temps, autographe, pain aux bananes, pipi et c'est reparti avec ma bande de flyeux d'une dizaine d'unités. Combien de temps vais-je rester à leurs basques, là est la question. Déjà Raymond et Marcus n'ont pas réussi à s'accrocher, ils sont rejetés du groupe, livrés à leur triste sort, à batailler contre le vent. 

Km 50, je veux rester dans les roues jusqu'au point le plus au sud de notre ride, soit la montée Guay, ce sera toujours ça de fait. Toujours vent de côté perturbant et pourtant la moyenne oscille entre 30 et 40. Je ressens un certain plaisir à filer avec eux et aussi une certaine gêne à ne pouvoir prendre un relais, je laisse ça aux gros mollets. 

Km 55, il y a ceux qui mènent l'allure, souvent les mêmes, Ralph, Olivier, Martin L parfois Martin Do, et les autres qui suivent en s'abritant comme ils peuvent, moi en tête, France, Martin B et un gars que je ne connais pas, Marc-André je pense. Je profite d'un moment de répit pour discuter de course à pied avec Martin B, il a réduit le volume à cause d'un mal de genou. T'as l'air plutôt en forme sur le vélo, lui dis-je. Non c'est l'orgueil, qu'il me répond. Cette portion de 20 bornes est couverte à 32 de moyenne. 

Km 63, extrême sud, objectif atteint, on bifurque plein ouest, vent pleine tronche, ça va être la partie la plus dure du brevet. Encore 30 km de côtelettes et de faux plat avant d'atteindre la Covey Hill, je sais pertinemment que je ne pourrais suivre le rythme du groupe car je suis déjà en sur régime musculaire. 

Km 70, je suis surpris d'être encore dans les roues mais une énième côtelette m'achève, je décroche en arrivant au chemin Roxham. Ma Maserati Piuma Ti n'a plus d'essence dans le réservoir. Il faut que je m'alimente et que je reprenne mon propre rythme. Il va me falloir négocier avec le vent en solo car je n'ai plus d'abri. 

Km 80, ça souffle toujours de face mais il n'est que 9h30 et le vent n'a pas encore atteint sa force maximale, faut donc pas flâner. Doucement mais sûrement, j'approche de la première montée de la Covey Hill, ce monument qu'on voit de loin. 

Km 91, au niveau du camping, c'est là que commence le segment de Strava pour la montée. C'est sans illusion que j'attaque la grimpette sur le triple plateau, je n'aurai pas la force de battre mon record de mercredi dernier, lors de ma reconnaissance avec Marielle. Je monte comme je peux, c'est déjà assez dur comme ça. 

Km 93, 15 minutes au lieu des 12 minutes à battre, j'étais plein d'ambitions ce matin dans mon lit quand je pensais à ce segment. Le rush des 70 premiers kilomètres m'a grugé pas mal d'énergie. 

Km 96, je salue Fred en sens inverse suivi 5 minutes plus tard d'Antoine. Ils ont terminé la boucle de Franklin et s'en retourne déjà. Ils ont plus de 20 bornes d'avance plus l'arrêt au contrôle, ce qui fait bien une heure d'avance à mi-parcours, ce qui fera deux heures à l'arrivée. Wow, ce sont des extra-terrestres. 

Km 100, je suis étonné de ne pas avoir été rattrapé par l'arrière car mon rythme jusque la CH a été plutôt lent. Mais voilà justement deux ombres qui se rapprochent derrière moi, c'est Jean et Gilles qui me dépassent en atteignant Doréa. Cet endroit est lugubre. Des bâtiments abandonnés constituaient un institut pour orphelins pendant les années 1950, ceux qu'on appelait les orphelins de Duplessis, une majorité d'enfants des premières nations qu'on voulait faire disparaitre. À regarder sur YouTube, c'est édifiant. Fin de la parenthèse historique. 

Km 105, je me motive en me disant qu'il ne reste plus que quelques bornes avant de virer de bord, donc fini le vent qui nous freine. Je suis repassé devant Jean en prenant le shortcut rejoignant Blackwood. Hey, t'as triché me lance-t-il ! Désolé mon cher, j'ai simplement suivi le fichier GPS que tu nous as gracieusement offert sur le site du CVRM. 

Km 109, c'est l'heure de sortir la grande voile car ça souffle fort dans le dos. Rapide rush par la 202 bien pavée jusqu'au contrôle de Franklin. 

Km 113, je retrouve ma bande de rapides de ce matin qui se restaure. Deuxième checkpoint, j'achète un sandwich jambon moutarde jaune pas très bon, et un coke qui passe de travers à la première gorgée. Je rassemble mes forces comme je peux car j'ai pas mal donné jusqu'ici. D'autres cyclos arrivent, Raymond, Marcus, Martin Du et les trois du tri. Même si le vent devrait être maintenant favorable pour les prochains kms, il va me falloir rentrer au bercail. Je laisse filer les locomotives et sans perdre de temps, je file moi aussi à l'anglaise, en solo. 

Checkpoint de Franklin (Photo Martin Doyon)

On s'alimente, on s'hydrate ! (Photo Martin Doyon)

Km 114, la montée Covey Hill m'attend à la sortie de Franklin, je monte relax, bien poussé dans le dos, c'est cool. J'atteins le plateau et la même route qu'à l'aller. C'est maintenant 4 km de faux plat pour le deuxième passage au sommet de la CH, Éole est à présent mon allié, je me sens rassuré. 

Km 122, descente vertigineuse, mon vélo fly à 75 km-h, je sens un léger flottement dans la direction de mon Piuma, pas les mêmes sensations que mon char d'assaut de Turismo, va falloir s'habituer. Gilles me rejoint en bas de la descente et me lâche sur la 203, km 126, vent de côté.

Vers la descente vertigineuse de la CH (Photo Martin Doyon)

Km 132, chemin Cowan, vent arrière à nouveau, ça file royalement, au dessus des 30 à l'heure sans forcer, c'est le pied. Encore 26 km jusqu'au contrôle, je trouve cette portion moins pénible que l'ancien 200. D'habitude je frappais un mur à ce moment, pendant la digestion. 

Km 146, un groupuscule formé de Jean, Yvon et Jacob me rattrapent à vive allure, genre 40 à l'heure, je les laisse s'éclater ensemble. J'avale un gel car je sens que j'ai besoin d'un boost pour rallier le contrôle. 

Km 150, à présent sur la 219, le vent est bien installé de côté, avec de fortes rafales latérales. Je m'accroche au guidon pour ne pas me faire emporter en perdant de l'adhérence, ça devient assez dangereux. Ouin, un grain de folie disais-je dans l'introduction de mon récit. Ça ne doit pas être évident de rouler en peloton dans ces conditions, à cause des écarts. Les larges jantes de roues ne sont pas très conseillées aujourd'hui, à cause de leur prise au vent, n'est-ce pas Fred avec tes flans de roue de 50 mm!

Km 158, voilà Sherrington et son troisième contrôle au dépanneur Jovy. Quelques cyclos discutent en s'hydratant car le soleil et surtout le vent dessèchent nos vieilles carcasses. Ralph, Oliver et Martin L sont absents, ils ne restent que Martin B et Do, France, Stéphane, Jean et le duo Clément. Je m'avale un autre sandwich jambon arrosé d'un grand Perrier avec lequel je refill mon bidon et mon Camelbak. Je m'assieds contre le mur pour reposer les jambes, Martin B fait de même, il a l'air épuisé, sûrement une de ses premières rides de l'année. Pas le temps de terminer mon lunch que la gang repart. Tant pis, j'ai manqué le train, il me faudra continuer solo. 

Du vent dans les voiles (Photo Martin Doyon)

Ya bon Jovy ! (Photo Martin Doyon)

Km 165, on rejoint la 221 pour atteindre St Édouard vers 14h. Le rafales s'intensifient encore, les bourrasques latérales balayent la poussière des champs et la ramène sur la route. On se croirait dans l'Ouest américain ou rien n'arrête le vent dans ses grandes plaines. Il ne manque que les boules de buisson traversant le paysage.

Km 170, Stéphane Proulx me rejoint sur la route après un arrêt pour besoin naturel, je suppose. Nous montons la montée Monette à 48 de moyenne sur l'overpass de la 15, ce sera notre dernier fast rush du brevet. 

Km 174, en effet, en rattrapant le rang St André, nous obliquons nord-ouest. Nous avons grand peine à avancer car même si le vent est de côté, parfois presque face, nous sentons sa force contre la nôtre. Il nous faut mouliner pour grignoter chaque kilomètre et la moyenne s'en ressent. Jusque là, j'étais à 26,5 km-h et j'ambitionnais d'atteindre les 27 à l'heure pour finir, tel que prévu sur ma feuille de route. Mais c'était mal étudier le final avec ce maudit vent défavorable. Pour l'heure, on se traine à 20, de vrais escargots. 

Km 186, voilà Candiac, un peu plus abrité dans les rues, quelques passages poussés sur la rue d'Auteuil. Stéphane navigue parfois devant, parfois derrière, au gré de ses accélérations et de ses ralentissements. De mon côté, je roule plutôt constant. Même dans ces éprouvantes conditions, la conduite de mon Piuma me donne entière satisfaction, je suis confiant pour la suite des brevets. Je ne ressens pas de douleurs, ni aux jambes, ni au haut du corps. 

Km 191, retrouvailles avec Taschereau, je bouffe le reste de mon sandwich qui trainait dans ma poche arrière remplie de mayonnaise, celui que je n'avais pas terminé à Sherrington. Pas de grosse moyenne là non plus, adieu record envisagé, j'essaye de sauver les meubles. 

Km 198, passage sur Pelletier, je largue Stéphane au profit des lumières. Ultime rush sur Victoria, vent une dernière fois dans la poire. On boira le calice jusqu'à la lie puis on sonnera l'hallali. 

Km 203, enfin le dépanneur du coin. Quelques cyclos sont encore présents, Jean et les Martin B et Do qui viennent aussi d'arriver depuis peu. Mon carnet est estampé à 15h48, temps de 8h48, moyenne 25,6, je suis écoeuré. Il me manque 7 minutes pour battre ma perf de l'an passé, ça aurait été possible avec un peu plus de conviction mais cette foutue météo m'a pas mal découragé. Ce sera pour une autre fois, avec Piuma, rien d'impossible. Jean est inquiet pour Martin Du et Marcus qui ne sont pas encore arrivés. Je reconstitue mes forces avec un lait au chocolat puis m'en retourne au stationnement. 

Rangement du matose, texto à ma chérie et bilan de cette journée avec un vent à écorner les boeufs. Était-ce une bonne idée d'aller faire du vélo malgré les conditions extrêmes annoncées par miss météo? Je pense que oui, c'était parfois à la limite du danger mais nous avons eu une belle journée ensoleillée. Ça aurait été plus compliqué si la pluie s'en était mêlée. Comme dirait Jean, cette expérience nous rendra plus fort pour les prochaines rides. Et la prochaine sera le brevet de 300, cet autre samedi qui vient. En attendant, je vais surveiller la prévision météorologique. Mais pour me décider d'aller rouler, ce n'est pas elle qui va faire la pluie et le beau temps ! 

Le soir, en regardant les activités du jour sur Strava, j'aperçois celle de mon ami Rémi B qui a flyé un Montréal-Québec, vent arrière à 31 de moyenne, sans effort précise-t-il. Cela peut aussi être jouissif, la météo !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire